La Belgique 9e sur la liste des paradis fiscaux…!

Communiqué de presse du FAN (Financieel Aktie Netwerk) et du RJF (Réseau pour la justice fiscale)
1 novembre 2009

Un classement des paradis fiscaux ou juridictions les plus opaques FSI (Financial Secrecy Index) a été établi par des chercheurs dans le cadre d’une cadre d’une campagne internationale visant à une plus grande transparence des places financières et centres offshore.

L’indice d’opacité FSI (Financial Secrecy Index) évalue le degré de secret atteint par chaque juridiction et sa résistance à coopérer avec des autorités administratives ou judiciaires étrangères.

Ces facteurs confèrent à chaque centre financier un « score d’opacité » qui est ensuite combiné à l’importance des activités financières transfrontières. Le résultat détermine la place au classement de l’opacité financière.

Suivant ce classement, les paradis fiscaux les plus importants sont : (1) Delaware (Etat à l’intérieur des Etats-Unis) ; (2) Luxembourg ; (3) Suisse ; (4) Iles Caïmans ; (5) City de Londres (GB) ; (6) Irlande ; (7) Bermudes ; (8) Singapour ; (9) Belgique ; (10) Hong Kong ; (11) Jersey ; (12) Autriche…

Voir pour l’index complet : www.financialsecrecyindex.com/2009results.html

Pour John Christensen (directeur du secrétariat de Tax Justice Network à Londres ; www.taxjustice.net), « le secret est un des éléments fondamentaux du système financier mondial. Dans le but d’attirer des flux financiers, territoires et juridictions se livrent une bataille sans merci. Mais ceci a un prix. Le secret financier couvre toutes sortes de délits, crimes et pratiques abusives : blanchiment d’argent, évasion et fraude fiscale, délits d’initiés, financement du terrorisme, détournement de fonds, flux financiers illicites, carrousels…et bien d’autres encore. »

Cet indice d’opacité FSI démontre la nécessité de nouvelles réglementations de la finance internationale et notamment d’un échange automatique d’information entre juridictions, plutôt qu’à la demande comme le demande l’OCDE.

Le secret bancaire n’est qu’une des formes de confidentialité offertes par les paradis fiscaux. Les pays anglo-saxons utilisent souvent des formes plus subtiles et douteuses de secret comme les trusts ou encore certaine formes de société.

Les paradis fiscaux ne sont pas de lointaines îles de cocotiers, comme notre imaginaire nous le représente souvent. Ce sont en fait des nations riches dans lesquelles de riches enclaves travaillent en connexion avec des juridictions satellites, qui servent de conduits pour orienter les flux financiers illicites sur les grands marchés de capitaux.

Ainsi en est-il du Delaware aux USA, particulièrement hermétique aux échange d’informations concernant les très nombreuses sociétés qui y sont enregistrées, ou encore de la City de Londres reliées aux îles anglo-normandes et à d’autres territoires du Commonwealth,…

Le Luxembourg (2°) et la Suisse (3°) se sont spécialisés dans le « secret bancaire » et la gestion de fortune, le Luxembourg accueille aussi massivement les Hedge Funds. Comme beaucoup de juridictions dont la Belgique qui défendent le secret bancaire, le Luxembourg prétend par là « protéger la vie privée ». Ce qu’ils oublient d’ajouter : c’est que protéger la vie privée des élites riches, c’est aussi les aider à ne pas payer leurs impôts !

Les îles Caïmans (4°) sont le 5° centre financier mondial, un grand nombre de sociétés d’investissements y résident, mais elles refusent d’être appelées « paradis fiscal ».

Même si la City de Londres (5°) est la plus transparente de tout l’indice, son importance dans la finance offshore est tellement considérable qu’elle pèse finalement plus que de petites îles moins transparentes, mais dont le rôle financier est restreint au niveau mondial. Elle est en effet, le plus grand centre financier mondial et est un peu comme un Etat dans l’Etat, au centre d’un réseau financier qui comprend environ la moitié des 60 juridictions reprises dans ce classement.

La Belgique, 9° au classement mondial réussit un score d’opacité de 75% (voir fichier joint) ; outre son secret bancaire fiscal qui limite très fortement les échanges d’informations bancaires avec l’administration fiscale, il convient de rappeler qu’elle ne souscrit pas à l’échange automatique d’informations au niveau de la Directive européenne sur l’épargne, ne possède pas de registre du style FICOBA français. De très nombreuses conventions ou traités de double imposition ont été signées par la Belgique avec d’autres pays, mais jusque récemment aucune ne prévoyait d’échange d’informations bancaires. Il est par ailleurs reconnu que la Belgique attire plusieurs dizaines de milliers d’« exilés » fiscaux français désireux d’échapper à l’impôt sur la fortune et de hollandais qui par là, évitent un impôt portant sur la globalité de leurs revenus. La récente Commission parlementaire sur la grande fraude fiscale qui a abouti à 108 propositions votée à l’unanimité, a rappelé combien les juridictions européennes (Luxembourg, Suisse, Gibraltar, Ile de Man…), combinées au secret bancaire « à la Belge » contribuaient à faire de notre pays une terre d’élection pour la fraude. Le suivi des belles résolutions de la Commission se fait encore attendre…

59 des 60 juridictions examinées n’exigent pas des sociétés et entreprises de déclarer leur vrai propriétaire. http://www.secrecyjurisdictions.com/PDF/Monaco.pdf .

Aucune n’a un registre des trusts et fondations accessible via internet (http://www.financialsecrecyindex.com/documents/FSI%20-%20Implications.pdf

Un des usages reconnus des paradis fiscaux est de faciliter les flux financiers illicites. La Banque Mondiale a repris les estimations de Raymond Baker, directeur du GFI (Global Financial Integrity) qui estimait pour 2005 les flux financiers illicites, entre seize cents et mille milliards de dollars, dont la moitié proviendrait des pays en développement et économies en transition. Toujours selon R.Baker, « pour un dollar accordé par les gouvernements occidentaux à titre d’aide au développement, environ dix reviennent dans le Nord » en dessous de table via des banques, hommes d’affaires et intermédiaires de toutes sortes, mais également via les paradis fiscaux ou juridictions opaques.

L’indice de l’opacité financière FSI considère l’initiative principale de l’OCDE par rapport aux paradis fiscaux comme complètement insuffisante. Les listes établies après le G-20 de Londres ont plutôt servi à blanchir bon nombre de juridictions qu’à les identifier. Demander de signer 12 accords d’échange d’informations à la demande, laisse le problème des montages financiers liés aux paradis fiscaux intact. En fait comme le montre l’indice FSI, les plus grands pourvoyeurs d’opacité sont les membres de l’OCDE eux-mêmes. L’institution internationale est donc bien mal placée pour mener une lutte efficace puisqu’elle est elle-même aux prises avec des conflits d’intérêts qui divisent ses membres. Affronter le secret présent dans la finance internationale demande une autre approche plus profonde, plus internationale et à plus long terme.

La réunion des ministres des finances du G-20 à St Andrews le 7 novembre donne l’occasion de remettre toutes les juridictions sur pied d’égalité en demandant la création d’un accord multilatéral d’échange d’informations fiscales avec sanctions à la clé.

Les bilans des sociétés transnationales doivent être modifiés pour rendre compte des bénéfices et impôts payés dans chaque pays où elles travaillent. Des normes internationales claires sur les véritables propriétaires de sociétés, trusts, fondations et autres véhicules présents dans les juridictions opaques sont nécessaires. Il s’agit aussi d’un véritable changement culturel à promouvoir pour que notre monde devienne moins tolérant à l’opacité et donc à la corruption.

 

 


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