[Eric Nemes]

III. TRANSPORTS Mobilité des personnes

A l’université, les offres de forums et séminaires super intéressants se bousculent et me laissent dans l’embarras ; après la santé, le Forum climat du vendredi matin et démocratie l’après-midi, ce samedi matin, que choisir? la bifurcation écologique, l’UE ou le forum transports … ?
Vu l’importance du secteur des transports pour les justices climatique et sociale et l’aguichante campagne d’Attac Allemagne,*1 je vais aux transports…
Le dernier rapport du GIEC montre à quel point il est urgent de changer de cap. Le volume global du trafic doit être réduit et nous avons besoin d’une part nettement plus importante des transports publics (trains, trams, bus) et de vélos dans la répartition modale. Cela vaut aussi bien pour la mobilité des personnes que pour le transport de marchandises.
Des milliers de bons emplois peuvent être créés dans la production de véhicules, dans l’organisation de la logistique, du co-voiturage et de l’inter-modalité…
Comment les travailleurs concernés peuvent-ils être des acteurs centraux de ce changement tout en garantissant un travail décent qui évite les dérives de type Uber et Deliveroo ?
En 2020, “Fridays for Future” en Allemagne s’est solidarisé avec les travailleurs des transports publics et a soutenu leurs grèves – ce bon exemple de convergence entre le mouvement climatique, les syndicats ouvriers et le groupe Attac “Einfach Umsteigen” *1 a permis de faire pression sur les politiques et de réaliser l’expérience du billet ou pass à 9€ !

Après plus d’un an de campagne menée par les Verts, die Linke, des syndicalistes, des démocrates, des débats parlementaires, et un boost dû au doublement des prix des carburants, le gouvernement fédéral allemand a accepté l’expérience d’un abonnement mensuel à 9€. Pendant les trois mois d’été 2022, les Allemands et les visiteurs ont pu voyager avec un pass à 9 euros par mois sur les réseaux fédéraux, locaux et régionaux : train, tram, métro, ferry… à la seule exclusion des trains à grande vitesse. Cette expérience géniale a certes provoqué un certain chaos (trains bondés, dédoublements et matériel en panne, rupture d’approvisionnement des cabines électriques, quais et services surchargés), mais aussi un succès exceptionnel reconnu par les pires détracteurs de la mesure, un passager sur cinq était un nouvel usager qui utilisait le train pour des achats, des loisirs, des excursions, le travail. Bref il y aurait eu un transfert de 10% de la route au rail et cela aurait permis d’économiser autant de CO2 qu’une année de limitation de vitesse sur les autoroutes», soit 1,8 million de tonnes de CO2.*2

Ces changements essentiels et intéressants restent marginaux, ils résultent de la capacité d’adaptation du capitalisme rhénan (e. a. cogestion avec les syndicats de la Deutsche Bahn), mais ils n’ont pas pu arrêter ou réorienter les constructeurs auto allemands vers autre chose qu’une voiture individuelle intelligente, ou des SUV, ni les obliger à développer des ateliers de transformation des voitures à moteur thermique en voitures électriques partagées ni de limiter la vitesse de ces engins sur les autoroutes !
Bref incapacité de sortir de la logique de prédation et d’accumulation pour aller vers une logique de durabilité circulaire.

Et qu’en est-il en Belgique ?

En 2019 le gouvernement wallon a adopté sa Stratégie de Mobilité Régionale pour les personnes et en 2020 pour les marchandises. Et ce plan en 10 priorités doit permettre de réduire de 35% les émissions de GES pour 2030.*3
Il comprend un développement des voitures partagées, des taxis sociaux, du co- voiturage, bref un changement dans notre manière de nous déplacer.
Au niveau fédéral, les nouveaux contrats de gestion signés fin 2022 pour 10 ans, entre le gouvernement (représenté par le Ministre Gilkinet) et Infrabel d’une part, la SNCB d’autre part vont dans la bonne direction. 30% de hausse des voyageurs, deux fois plus de transport de marchandises, 10% de trains en plus, ou encore un renouvellement en profondeur de la flotte de véhicules, une augmentation de 25% des trains S, avec plus de parkings voitures et vélos.

Conclusion

Comme le soulignait un représentant syndical belge, bien que les syndicats aient depuis Copenhague commencé à intégrer les contraintes environnementales dans leurs revendications (RISE), en Belgique, les quelques tentatives de rassemblement ou de convergence sur des projets ou objectifs communs*4 de mouvements environnementalistes, syndicaux et de partis de gauche n’ont pas encore débouchés sur des campagnes ou mobilisations fédérales ou régionales et restent embourbés à
un niveau ponctuel.
NB: nous traiterons du transport de marchandises qui a été totalement privatisé par l’Europe, dans un prochain article.

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  1. https://www.attac.de/kampagnen/verkehrswende/startseite-einfachumsteigen Einfach umsteigen Klimagerechte Mobilität für alle! = Changer facilement de véhicule, une mobilité adaptée au climat pour tous!
  2. Articles des Echos de la Bourse et de la RTBf
  3. Pour plus d’infos voir les contributions au colloque de 2021: https://gresea.be/IMG/pdf/programme_colloque_bruxelles_-le_rail.pdf Sur le site de Ferinter, vous trouverez le texte des communications ainsi qu’une vidéo des séances plénières. https://ferinterorg.wordpress.com/letat-et-le-rail-les-transports-ferroviaires-au-prisme-de-la-puissance-publique
  4. Tout autre chose, Faire front…

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