Le cadre législatif relatif aux associations de santé intégrées (ASI) a été fixé par le décret de la Communauté française du 29 mars 1993, repris et modifié par le décret de la Région wallonne du 24 novembre 1994 et précisé près de cinq ans plus tard par les arrêtés d’application du 22 mai 1999. Actuellement la Région wallonne agrée et subsidie une petite quarantaine d’ASI, dont la plupart sont membres de la Fédération des maisons médicales et collectifs de santé francophones.
Est considérée comme ASI, selon le texte du décret concerné, « toute association pratiquant la dispensation par une équipe de premier recours pluridisciplinaire en matière médico-psycho-sociale (…) de soins octroyés dans une approche globale, tant organique que psychologique et sociale, considérant le malade comme un sujet ayant une histoire personnelle et s’intégrant dans un environnement familial, professionnel et socio-économique, de soins intégrés octroyés en incluant la prévention qui peut être réalisée, soit lors de contacts individuels, soit lors des actions menées vis-à-vis d’une population définie, de soins continus octroyés en assurant la synthèse, la maîtrise et le suivi de l’information relative à l’ensemble des problèmes de santé vécus par le patient tout au long de sa prise en charge, à quelque niveau que ce soit »1 ;
Outre cette première mission de dispensation de soins et services tant curatifs que préventifs, l’ASI doit d’une part « assurer des fonctions de santé communautaire » en développant « des activités coordonnées avec l’ensemble du réseau psycho-médico-social » et en créant « des conditions de participation active de la population à la promotion de sa santé »2, et d’autre part « assurer des fonctions d’observatoire de la santé en première ligne », c’est-à-dire « recueillir des données permettant une description épidémiologique de la population desservie, l’évaluation des objectifs et l’auto-évaluation de ses activités en vue d’une amélioration de la qualité des soins »3.
L’équipe doit comprendre « au moins deux médecins généralistes (…), un kinésithérapeute et un infirmier (ou une infirmière) et un service d’accueil et de secrétariat »4, elle doit se réunir au moins une heure par semaine aux fins de coordinations5 et « doit s’assurer la collaboration de travailleurs sociaux et de psychothérapeutes »6.
Les ressources financières des ASI proviennent essentiellement de l’INAMI via le paiement des prestations de type curatif, soit sous forme de prestations à l’acte, soit, pour la grande majorité des ASI wallonnes, sous forme d’un paiement forfaitaire à la capitation (en fonction du nombre de « patients » inscrits dans la structure). Aucun financement structurel spécifique n’est prévu, à quelque niveau de pouvoir que ce soit, pour les travailleurs psychologiques ou sociaux. Les équipes qui font le choix d’en engager les supportent dès lors sur fonds propres, c’est-à–dire au détriment des revenus des travailleurs « INAMI ». Les subsides régionaux permettent juste de financer une partie des postes d’accueil nécessaires et le travail de coordination au sens large.
Face à l’accroissement de la fracture sociale que nous connaissons actuellement et face à l’aggravation des problématiques socio-sanitaires qui en résultent, face également à l’augmentation exponentielle des coûts des soins de santé hospitaliers, les ASI peuvent offrir à la population des soins et services de santé de proximité de qualité, dans une perspective globale, intégrant à la démarche curative une importante dimension de promotion de la santé (via des actions préventives et éducatives) en collaboration étroite avec les autres acteurs de l’ambulatoire et avec la capacité de s’adapter de manière rapide et souple à de nouveaux besoins émergeants. Elles peuvent en outre constituer pour les pouvoirs publics de précieux observatoires de la santé susceptibles de leur apporter des données critiques pour orienter les politiques sociales et de santé dans les prochaines années.
Mais pour pouvoir remplir pleinement ces missions, il conviendrait que les pouvoirs politiques régionaux renforcement singulièrement leur appui et leur financement à ce secteur selon les différentes pistes que nous allons maintenant brièvement évoquer.
1) Soutenir une implantation plus harmonieuse des ASI en Wallonie
La répartition géographique des ASI est très inégale en Wallonie. Elles sont concentrées dans les grandes villes; les petites villes en sont généralement dépourvues, de même que les zones rurales. Or c’est aussi dans ces zones qu’il manque d’autres structures comme les services de santé mentale, les plannings, ….
Les ASI, et particulièrement celles utilisant le système de financement forfaitaire, permettent une meilleure accessibilité aux soins, notamment pour les populations précarisées. Celles-ci sont, par ailleurs, peu mobiles. Idéalement, il serait judicieux que chaque wallon puisse avoir le choix de bénéficier ou non des services et soins d’une ASI géographiquement accessible, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui.
Des aides publiques à l’implantation sont nécessaires pour permettre un développement équilibré sur l’ensemble du territoire. Celles-ci doivent être accordées prioritairement aux ASI nouvelles en zone « vierge ». Pour ce faire, il est nécessaire de procéder à un découpage territorial en s’inspirant de certaines « zonifications » déjà existantes.
2) Stimuler l’intégration des ASI.
Si, autour d’une situation complexe, les différents intervenants médicaux et paramédicaux travaillent dans la même structure et le même lieu, la coordination s’en trouve grandement facilitée. Les réunions de coordination ne suffisent pas : la coordination informelle au quotidien joue un rôle très important pour assurer la cohérence des interventions. De plus, ceci limite le nombre d’intervenants : les soignants se connaissent mieux et peuvent dès lors coopérer plus facilement en tenant compte des capacités et des limites de chacun.
La législation ASI actuelle pose problème en ce sens qu’elle considère sur un même pied diverses réalités assez différentes en terme d’intégration .Entre certaines ASI fortement intégrées disposant même en interne de psychothérapeutes et de travailleurs sociaux, et à l’autre bout certaines pratiques de groupe de généralistes qui se sont adjoints les professions nécessaires pour rentrer dans les critères du décret, on retrouve diverses situations intermédiaires. D’autre part, pour des raisons liées à leur histoire et/ou à des réalités locales, certaines équipes ne souhaitent pas intégrer en interne certaines professions telles que kinésithérapeute ou infirmière. Une différenciation nous semble dès lors nécessaire pour éviter un nivellement par le bas, ce que l’on observe actuellement.
Ceci nous paraîtrait possible via un financement par paliers, tel qu’il existe par exemple au niveau des centres de planning familial, afin d’offrir un financement plus important en fonction du niveau d’intégration pour inciter les équipes à intégrer au maximum l’ensemble des professions concernées.
3) Renforcer le pôle non « médical » des ASI.
L’intégration du pôle psychosocial dans une équipe de soins primaires est très important : en effet, les déterminants psychosociaux ont une place importante dans les problèmes de santé rencontrés à ce niveau. Les intervenants médicaux habituels ne sont pas suffisamment formés pour aborder ces facettes : l’intégration dans l’équipe de travailleurs psycho-sociaux favorise la prise en compte de ces déterminants et permet d’éviter une médicalisation des problèmes psycho-sociaux. Notons qu’actuellement une partie non négligeable des équipes wallonnes disposent de psys et/ou d’AS sans financement public, sur fonds propres comme nous l’évoquions plus haut : elles ont fait ce choix difficile car elles ont pris conscience de l’importance de cette dimension. Notons enfin que la majeure partie des ASI travaillent en milieu précarisé, là où les besoins psycho sociaux sont les plus importants : bien souvent, ces besoins ne sont pas suffisamment rencontrés par les structures existantes.
Des financements adéquats, en termes de subsides en personnel, doivent donc être offerts aux ASI si l’on veut qu’elles assument pleinement leurs missions décrétales.
4) Supprimer la limitation du maximum de 50% de subsidiation.
Selon le décret en vigueur7, les subventions des pouvoirs publics régionaux aux ASI sont limitées à un maximum de 50% des dépenses engagées, ce qui pose problème pour les frais de personnels. En effet cette formule exclut les ASI du financement de l’emploi dans le cadre, par exemple, des accords du non-marchand.
5) Permettre l’accès aux subsides d’infrastructure.
Alors que les pouvoirs publics wallons investissent larga manu dans la construction d’infrastructure hospitalière, alors que la région flamande de son côté subventionne les investissements immobiliers des wijkgezondheidcentra (nos homologues), et alors que pour bénéficier d’un agrément certaines conditions en termes d’aménagement et de sécurité des locaux doivent être rencontrées par les ASI, celles-ci n’ont pas accès aux subventions correspondantes. Il serait pourtant cohérent que cela soit !
Patrick je me demande si un petit résumé du style de ce qui suit ne pourrait pas agrémenter l’article, sinon c’est parfait. Excuse-moi, quand je reçois un courriel je réponds de suite ou jamais (peu de temps disponible)
En résumé pour reprendre le schéma qui nous était proposé
1/ le bilan de la politique d’action sociale et de santé menée ces dix dernières années en Région wallonne : globalement, il ya eu des avancées il existe une reconnaissance de l’action spontanée de nombreux groupes de prestataires. Ce cadre institutionnel permet de poser les problèmes et qui sait de les résoudre ? On peut regretter le manque d’une politique globale de la santé en région wallonne qui permettrait d’impulser un peu de cohérence dans l’ensemble. Les moyens suivent difficilement alors que l’ambulatoire est un secteur à renforcer hardiment, si on veut ne pas rater le virage ambulatoire et l’objectif de moindre hébergement.
2/ les regards portés sur les objectifs atteints, les secteurs bénéficiaires, les avancées pour chacun, les enseignements à en tirer, etc.
Cf. le corps de l’article, mais là aussi on a du mal à dégager une véritable politique d’implantation de centres, de priorité, d’incitants à l’installation dans les zones en difficultés. Le plan fédéral pour la MG pourrait être compléter d’un plan régional pour les structures multidisciplinaire.
3/ les prospectives pour les dix années à venir, la politique qui doit encore être impulsée, les réels enjeux, les priorités de l’action sociale, etc.
Il faudrait probablement organiser de nouvelles tables rondes de l’ambulatoire pour tenter avec les pouvoirs publics régionaux (en coordination avec le fédéral) d’élaborer une politique de santé régionale (via les leviers régionaux). De ce point de vue une politique d’infrastructure permettrait à la fois de prioriser l’implantation de centres pluridisciplinaires de première ligne en fonction des besoins, avec là où cela manque installation de fonctions (planning, assuétudes, santé mentale) telles que définies dans le projet de la fédération bruxelloise des MM (Michel ROLAND) pour la région de Bruxelles.
Bien à toi PD
1 Moniteur belge – 27.05.1993 – Communauté française – 29 mars 1993 – Décret relatif à l’agrément et au subventionnement des associations de santé intégrée – art. 1er, 1°.
2 Ibidem – art 1er, 3°.
3 Ibidem – art 1er, 4°.
4 Ibidem – art 5.
5 Ibidem – art 7.
6 Ibidem – art 8.
7 Ibidem, art 10.