Impossible de parler rémunération sans évoquer l’organisation sociétale actuelle et son impact délétère sur la planète et les relations entre les humains. Une société basée sur la concurrence et la compétition nous conduit comme un cheval fou vers un précipice mortel. Chacun regarde la rémunération de celui qui est au-dessus de lui, en se disant (souvent avec raison) : « il ne ‘vaut’ pas plus que moi, il n’est pas plus utile à la société. Donc je mérite plus ».
Il faudra poser une limite aux revenus et aux patrimoines. Ça ne se fera pas sans résistances, peut-être violentes, mais ne pas s’y résoudre conduira à des désordres bien plus grands. Les manifestations des gilets jaunes n’en représentent qu’un zakouski minuscule.
Cela étant posé, les revenus des médecins devraient donc être limités
Pour sortir des tensions sociétales grandissantes, il faut poser des bornes aux revenus des citoyens, médecins compris.
LA VISION DU GBO
- Quels sont les enjeux d’une politique de revenus ?
Outre la diminution de la tension sociale, une politique de revenus dans la santé favorise l’horizontalité organisationnelle des soins de première ligne. C’est là une condition même de la coopération interlignes et entre les médecins et les autres soignants.
Elle améliore l’attractivité relative de la médecine générale, elle tempère la concurrence stérile.
- Vers quelle politique de revenus tendre ?
Un professeur de médecine générale propose, partant du salaire du Premier ministre, une fourchette de revenus nets de 5.000€ à 10.000€ par équivalent temps plein (ETP) entre les différentes disciplines de la médecine, avec le libre choix du statut de salarié ou d’indépendant. Cet académique envisage un horaire de 48 heures/semaine, garde incluse. Si des médecins choisissaient (ou se voyaient contraints par l’intérêt public) de dépasser cette durée, ils recevraient un supplément d’honoraires ad hoc.
Le GBO suggère par ailleurs une harmonisation des revenus entre généralistes et spécialistes.
Pour obtenir un rapprochement sans remettre en cause les revenus extrêmes, il devrait être possible d’accorder aux généralistes (ETP) un revenu moyenégal à la médiane des revenus des spécialistes. La médiane est peu sensible aux extrêmes (en Belgique, le salaire brut moyen est de 3.489€ tandis que le salaire médian, qui n’est pas tiré vers le haut par les gros salaires, n’est que de 3.053€). Cette harmonisation rapprochera les généralistes, qui entre eux présentent une moindre variation de revenus, de la masse des spécialistes.
- Quel mode de paiement ?
Actuellement, la majorité des MG sont payés à la prestation (« à l’acte ») avec une part de capitation, en croissance, sous forme de DMG et de trajets et de pré-trajets de soins. S’y ajoute enfin une petite partie sous forme de paiement à la fonction (prime de pratique intégrée, par exemple).
Une minorité importante et croissante (+/- 800 MG, un peu moins de 10% des 10.000 généralistes actifs en Belgique) est payée à la capitation quasi intégrale (> 90%) avec, en sus, les actes techniques (rétribués à la prestation) et la prime de pratique intégrée.
LE GBO DEMANDE
- De réduire les écarts de revenus entre les disciplines médicales (et les professions de santé, en particulier au sein de la première ligne). Plusieurs méthodes sont envisageables. Nous en avons relayé deux ci-dessus. Quoi qu’il en soit, il est grand temps de se remettre autour de la table et de parler honoraires et honoraires « purs » (c.-à-d. sans prélèvements des gestionnaires d’hôpitaux ou de centres de première ligne pour couvrir les frais de fonctionnement).
§ des 4P à vérifier pour congruence avec les publications antérieures
- De poursuivre le mix des modes de paiement, selon les « 4P » du GBO
- Prestation (acte)
- Patient (capitation : DMG, trajets de soins…)
- (par) Prestataire (DMI, allocation à la pratique, honoraires de disponibilité, Impulseo I, accréditation, statut social)
- Pratique (Impulseo II et III, prime de pratique intégrée…)
Ces 4P pourraient un jour devenir les « 5P », si on intègre parmi les sources de revenus le paiement à la Performance, récompensant les processus d’amélioration de la qualité des pratiques. Il va de soi que les indicateurs servant à mesurer cette performance devront avoir été négociés au préalable avec la médecine générale, être introduit progressivement et être révisables.