Silvia Federici, Caliban et la Sorcière. Femmes, corps et accumulation
primitive (trad. par le collectif Senonevero, revue par Julien Guazzini), entremonde senonevero, 2014
Pas un roman mais une étude scientifique extrêmement bien documentée, et passionnante comme un roman.
Une exploration du rôle joué par la chasse aux sorcières dans la transition du féodalisme au capitalisme. En même temps que la privatisation des terres (notamment par les enclosures en Grande Bretagne) et que l’expansion européennes dans les Amériques, il s’agissait de briser le pouvoir des femmes, de montrer que toute forme de liberté était un danger pour la société des hommes et que leur corps ne pouvait qu’être impur. Le même mouvement de méfiance et de rejet a mené aux fables des indigènes cannibales, illustrées d’images dont la similitude est frappante. Un extrait, pioché vers le milieu : « la chasse aux sorcières en Europe était une attaque contre la résistance des femmes à la progression des rapports capitalistes, contre le pouvoir dont elles disposaient en vertu de leur sexualité, de leur contrôle de la reproduction et de leur aptitude à soigner. La chasse aux sorcières était aussi un instrument pour la construction d’un nouvel ordre patriarcal où le corps des femmes, leur travail, leur pouvoir sexuel et reproductif étaient mis sous la coupe de l’État et transformés en ressources économiques. » (p. 272)