En 2016, Carrefour a économisé 44 millions de charges en Belgique
Luc Van Driessche
Selon les calculs d’Ahmed Laaouej, chef de groupe PS à la Chambre, le distributeur français a pu éviter plus de 40 millions d’impôts grâce aux intérêts notionnels et réduire les cotisations patronales de 4 millions grâce au tax shift.
Aiguillonné par le PTB, qui a chiffré les gains engrangés par Carrefour Belgium par le truchement des intérêts notionnels (495 millions d’euros entre 2013 et 2016, selon les chiffres publiés par Le Soir), le chef de groupe PS à la Chambre, Ahmed Laaouej, y va lui aussi de ses petits calculs.
Le député socialiste, qui s’est surtout attardé sur l’année 2016, confirme: cette année-là, Carrefour a pu déduire au moins 125 millions d’euros d’intérêts notionnels en Belgique, dont 120,9 millions via Carrefour Finance, la filiale qui gère les opérations financières et la carte de crédit mise en place par le groupe en Belgique. Carrefour Belgium, qui gère les activités commerciales, a pu déduire de son côté pour 3,5 millions de notionnels. Ahmed Laaouej en déduit que Carrefour (39 sociétés au total), qui a déduit au moins 125 millions d’intérêts notionnels en Belgique, a pu ainsi éviter de payer plus de 40 millions d’euros d’impôts.
Le chef de file des députés PS va un cran plus loin, en chiffrant le gain fiscal empoché en 2016 par Carrefour grâce au tax shift.
En calculant le rapport entre le nombre d’équivalents temps plein (ETP) chez Carrefour (8.521) et le nombre d’ETP en Belgique (3,235 millions), on obtient 0,26 %. Ahmed Laaouej en déduit que les réductions de cotisations patronales du tax shift ont représenté pour le distributeur environ 4 millionsd’euros d’économie.
Cotisations patronales: -1,79 %
Entre 2014 et 2016, Carrefour Belgium a vu son taux de cotisations patronales passer de 20,83% à 19,04% (-1,79 %). Soit une économie de 5,7 millions d’euros sur les cotisations, une baisse plus importante qui s’explique par le tax shift et par d’autres mesures décidées sous le gouvernement Di Rupo.
Les calculs du chef de groupe PS permettent donc de chiffrer à quelque 44 millions d’euros le gain fiscal engrangé par Carrefour en Belgique sur la seule année 2016. Sans compter le saut d’index, qui a permis à Carrefour de réaliser 6,4 millions d’euros d’économies supplémentaires.
“Ces données démontrent bien que l’on peut mettre en doute le bien-fondé de la politique du gouvernement Michel consistant à réduire les charges en espérant créer un contexte favorable pour l’emploi”, souligne Ahmed Laaouej.
Qui voit plus loin. Selon lui, la suppression de 1.233 emplois n’empêchera pas Carrefour de bénéficier d’un surcroît de réductions de charges patronales, le tax shift devant prendre de l’ampleur en 2018 (+ 490 millions d’euros) et en 2019 (+ 283 millions). De quoi permettre à Carrefour d’économiser 5,2 millions cette année.
Pour le député socialiste, le gouvernement de Charles Michel est pris au piège de sa rhétorique. “On l’a bien vu chez Carrefour, chez ING, chez RTL: le tax shift n’empêche pas de grands licenciements collectifs.
Les réductions de charges sont transférées directement vers la poche des actionnaires et n’ont aucun effet durable sur l’emploi”, lance-t-il.
Ce n’est pas en asphyxiant la demande intérieure que l’on créera un climat propice à la reprise économique, ajoute le chef de file des députés socialistes. “La Sécurité sociale paiera deux fois: via une diminution des recettes puis via les suppressions d’emplois qui l’obligeront à financer des plans sociaux”.
Autant d’arguments qui plaident, selon lui, pour un changement de modèle. “Il faut en finir avec les réductions d’impôts sans contreparties et passer à un système de liaison entre les aides et la création d’emplois”.
[Source : Les Echos]