En théorie, en matière d’impôt sur le revenu, le secret bancaire est fermement établi. Le fisc ne peut recueillir aucune information auprès des banques, des caisses d’épargne et des établissements de crédit dans le but de taxer les clients de ceux-ci. L’administration ne peut pas davantage leur réclamer des données à caractère purement privé, sans que celles-ci aient un quelconque lien avec des placements ou des créances fiscales. Ainsi, les données concernant les dépenses d’un ménage ne peuvent être recueillies sans raison. Les organismes financiers ne sont tenus, d’aucune façon, de communiquer des numéros de compte au fisc ou de les informer de l’identité de leur propriétaire, de la somme d’argent s’y trouvant et de sa provenance. Les banques ne sont pas non plus tenues de communiquer la somme des intérêts versés aux contribuables.

Le fisc ne peut donc pas consulter votre compte bancaire personnel pour en connaitre le montant en espèces et en actions. Ceci n’a pas d’importance, si vous êtes salarié(e) car le fisc est parfaitement au fait de vos revenus grâce à la fiche remplie par l’employeur. Par contre, en ce qui concerne les indépendants, les sociétés ou les investisseurs, le secret bancaire représente une incitation à la fraude fiscale.

Dans son compte rendu de 2007, le Conseil Supérieur des Finances écrit que « la Belgique est l’un de rares pays de l’UE (3 sur 27) et de l’OCDE (4 sur 30) à s’accrocher à l’utilisation fiscale du secret bancaire ».

Il en va autrement du secret bancaire couvrant les comptes professionnels : si le fisc désire consulter le(s) compte(s) professionnel(s) d’un contribuable, refuser de fournir des informations est impossible. En cas de refus intervient alors une imposition d’office.

 

Dans des circonstances exceptionnelles, le secret bancaire peut être levé

 

1. Fraude

 

Si des intentions frauduleuses ont été avérées (très difficiles à prouver), alors il existe une procédure permettant de lever le secret bancaire. Néanmoins, celle-ci est difficile à exécuter. Un rapport de la Cour des Comptes, dans lequel il est mentionné que la législation fiscale entourant le secret bancaire n’est pas adaptée, renforce également cet avis. « Il y a une lacune dans la législation par laquelle le contribuable est extrêmement protégé. Ainsi, en 2008, le secret bancaire ne pouvait être levé que dans un cas sur huit pour six millions de contribuables ».

 

Il existe deux cas spécifiques dans lesquels le fisc peut exiger des banques qu’elles lui fournissent des informations :

 

– Lorsqu’un contribuable dépose une plainte

– Lorsque l’on peut conclure à de fortes présomptions de fraude après un examen « sévère ».

 

Si le secret bancaire est levé par une plainte déposée par un contribuable, il n’est pas encore tout à fait certain que toutes les informations parviennent au fisc. Si le contribuable considère que ces renseignements ne sont pas utiles, la banque ne doit pas communiquer ces informations.

 

2. TVA et droits de succession

 

L’administration est fondée de pouvoir lorsqu’il s’agit de réclamer des informations aux banques en matière de TVA et de droits de succession, après un accord avec l’officier ministériel.

 

Le jour du décès, afin de rendre possible un contrôle efficace sur la composition d’une succession, les banquiers sont contraints de communiquer l’état des comptes bancaires et des comptes de titres du/de la(e) défunt à l’administration. Ainsi, l’administration peut être informée avec certitude du décès d’une personne et des sommes, titres et valeurs qui lui appartenaient à cette date.

 

L’administration peut également ouvrir une enquête bancaire ; les banques sont légalement tenues de fournir, à la demande du directeur général, toutes les informations qui seraient nécessaires à la garantie d’une perception adéquate des droits de succession. De plus, l’administration doit pouvoir contrôler l’exactitude des informations dont elle dispose avec l’aide des registres et des documents desquels celles-ci proviennent. Ce droit de regard ne signifie toutefois pas que l’administration a le droit de consulter ces ouvrages à sa guise et qu’elle peut y faire des recherches. Par contre, elle a le droit de réclamer à la banque toutes les opérations que la personne décédée ou son époux/épouse a effectuées dans les trois ans précédant ou suivant le décès. Tout ceci concerne les informations que la banque a fournies au sujet du testateur/de la testatrice ou son mari/sa femme. L’administration ne peut donc pas invoquer l’obligation générale de fournir des renseignements si, par exemple, un compte est ouvert au nom de quelqu’un d’autre. Elle ne pourra pas non plus profiter d’une telle enquête pour découvrir les noms et adresses des héritiers.

 

Si l’enquête menée par l’administration à trait aux faits antérieurs aux trois ans précédant le décès, cette dernière ne peut plus exiger la restitution de toutes les opérations bancaires. Dans ce cas, les faits qui sont étudiés doivent être précisément définis. On considère que les faits sont assez précisément définis lorsque, par exemple, il est demandé si quelqu’un s’est procuré, durant une période donnée, des actions ou des obligations ; à quelle date des obligations devenues remboursables ont été mises en vente dans l’intention d’en encaisser le paiement, etc .

 

1. Débiteurs

Le secret bancaire vaut pour les contribuables ayant reçu un report indéterminé de dette fiscale. Dans le cadre de cette mesure, le législateur a expressément fixé que les fonctionnaires du fisc peuvent avoir recours aux banques en mesure d’obtenir toutes les informations nécessaires à la vérification de l’état du patrimoine de l’intéressé(e).

 

2. Le fonctionnaire de recouvrement peut ce que l’agent taxateur ne peut pas

Si jamais l’impôt est enregistré et que son montant doit être perçu, le fisc a bien accès aux données bancaires. Voilà une bonne dizaine d’années que le gouvernement a décidé d’attribuer aux fonctionnaires de recouvrement de plus grandes compétences en cas d’enquête. La question se posa immédiatement de savoir si, désormais, le fonctionnaire de recouvrement pourrait faire ce que, jusque là, l’agent taxateur ne pouvait pas faire : avoir recours aux banques pour rassembler des informations afin de percevoir l’impôt établi. Les percepteurs (des contributions) estimèrent qu’ils n’avaient pas à se soucier du secret bancaire. Les banques jugèrent l’inverse. Conséquence : de vraies batailles sont livrées devant les cours et les tribunaux afin de contraindre les fonctionnaires de recouvrement à respecter le secret bancaire. Finalement, le législateur couru au secours du fisc. Dans l’une des lois de fin d’année de 2006, il est explicitement mentionné que les fonctionnaires de recouvrement peuvent faire appel aux banques pour collecter des informations en vue de la perception de l’impôt auprès des clients de celles-ci.

 

3. Oncle Sam lève le secret bancaire belge

Début 2007, la Belgique et les États-Unis conclurent une convention fiscale de double imposition. Dans la loi de confirmation que le parlement belge a votée, à la demande des américains, le secret bancaire belge est tout bonnement abandonné. Le fisc américain pourra demander au fisc belge de récupérer auprès des banques belges des informations que le fisc américain, juge nécessaires à l’application de la législation fiscale américaine. La loi prévoit explicitement à cet égard que les banques belges ne peuvent pas se retrancher derrière le secret bancaire . Nous pouvons à présent nous poser la question de la raison pour laquelle la Belgique lève le secret bancaire pour l’Oncle Sam et qu’elle ne le fait pas quand le FAN le demande. Il est indéniable que l’Amérique est un allié puissant, encore en mesure d’imposer ses lois. La lutte contre le terrorisme que l’Amérique est en train de livrer y est pour beaucoup. Toutefois, cette convention démontre bien qu’il est possible et nécessaire de lever le secret bancaire.

 

L’Amérique désire échanger des données bancaires, également au niveau de l’UE, par l’intermédiaire de l’entreprise Swift (Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication). Auparavant, l’échange de données bancaires via l’entreprise Swift a déjà suscité de vives critiques à l’encontre des États-Unis. Ainsi, en 2006, on apprit que, depuis les attentats du 11 septembre 2001 et dans le cadre du Patriot Act, le bureau des renseignements de la CIA avait accès à pratiquement toutes les transactions bancaires européennes. À l’automne 2007, après concertation avec le Contrôleur européen de la protection des données, Swift, qui avait transmis ces données aux autorités américaines, a mis un terme à ces échanges. Pas pour longtemps ! Sous la pression du gouvernement américain, le Conseil de l’Union Européenne choisit de revoir les conventions. Le 8 juillet 2010, le Parlement Européen donna son assentiment à un accord américano-européen concernant le transfert de données bancaires de citoyens européens aux autorités américaines. Ceci signifie concrètement que les États-Unis vont de nouveau pouvoir épier les données qui sont échangées par Swift – entre l’Europe et les États-Unis mais également au sein de l’Union européenne.

 

Le banquier est-il soumis au secret professionnel ?

 

À côté des dispositions légales relatives au secret bancaire pour des informations concernant l’impôt sur le revenu, l’article 458 du code pénal prévoit un « secret professionnel pénalement sanctionné ». Mais la Cour de cassation a décidé que le secret professionnel n’était pas applicable au banquier s’il est question d’une enquête pénale. Il ne peut pas non plus s’opposer à une perquisition ou à la saisie de documents ayant trait à ses clients, même si l’enquête pénale est menée à l’encontre d’une tierce personne.

 

En Belgique, les banquiers luxembourgeois qui sont interrogés par un tribunal dans le cadre d’une enquête fiscale ne peuvent pas non plus en appeler au secret professionnel que la loi luxembourgeoise leur impose. C’est ce que rappelle l’arrêt de la Cour européenne, daté du 10 décembre 2002. Dans cet arrêt, la Cour révèle que le gouvernement luxembourgeois lui-même est d’avis que le secret bancaire luxembourgeois ne peut être objecté aux autorités judiciaires des autres états membres. La responsabilité pénale pour la violation du secret bancaire au Luxembourg ne vaut pas, en effet, lorsqu’un individu est entendu comme témoin par un tribunal ou est interrogé comme suspect, peu importe qu’il s’agisse d’un tribunal Luxembourgeois ou d’un tribunal étranger .

 

Le lien unissant les paradis fiscaux au secret bancaire

 

La libéralisation extrême des mouvements de capitaux a eu pour conséquence une difficulté accrue des contrôles sur les flux monétaires. Ainsi, la plupart des états sont bien conscients de la perte d’une part importante de ressources fiscales, due à la fuite des capitaux vers d’autres parties du monde. Les paradis fiscaux, également appelés « places bancaires extraterritoriales » occupent une place de choix dans l’incapacité à prélever de l’argent. Ces paradis sont, entre autres, caractérisés par :

– Un système d’impôts très bas ou une absence d’imposition.

– Un pays ne recueillant pas les informations nécessaires concernant les transactions sur son territoire. Il ne dispose, par exemple, pas de sens des structures de propriété des entreprises.

– Un secret bancaire strict : le pays ne confie aucune information à d’autres pays.

Souvent, les entreprises multinationales ont également des filiales dans de tels havres. Si, depuis les États-Unis, une entreprise veut vendre du matériel à l’Europe, elle a plutôt intérêt à le vendre d’abord à petit prix dans une de ses filiales localisée dans un de ces paradis fiscaux ensoleillés. Cette filiale les vend alors aux prix du marché à ses clients européens. Le gros de la recette est ainsi réalisé dans sa filiale où payer des impôts n’est pas nécessaire, ou très peu. Beaucoup d’entreprises localisées dans ces havres se limitent à une boîte postale. Ainsi, l’île de Man compte 76.000 habitants pour plus de 30 000 entreprises répertoriées.

 

 

Par le RJF-FAN

 


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