Analyses et propositions de Rémi Canfin, membre de longue date d’ATTAC Liège, nous a confié ses réflexions et propositions angoissées, que nous vous proposons en intégralité sur notre site. En voici une présentation.

Il part d’un double constat. Si nous voulons préserver un monde habitable pour tous, une mobilisation collective et internationale doit intervenir rapidement. Or celle-ci est entravée par le conflit quasi permanent entre nos intérêts individuels (qui peuvent aussi être des besoins (être nourri, chauffé, éclairé, informé) et l’intérêt commun, qui exige aujourd’hui plus que jamais de gérer les ressources de notre planète. 

Il nous faut, dit-il avec Bruno Latour, identifier « des objectifs positifs et enthousiasmants à atteindre ensemble ».

A. UN SEUL VRAI OBJECTIF !  Préserver un monde « habitable » pour tous :

3 défis principaux! … et une multitude de « défis associés » incontournables …

B. Défi n°1, Maîtriser le climat :

1. Cela implique de maîtriser le réchauffement climatique,

donc maîtriser l’accumulation des gaz à effets de serre (CO2, Méthane,…), donc maîtriser la production de ces gaz, la réduire,

donc réduire les émissions de CO2 et donc réduire les combustions qui les engendrent, réduire les émissions de méthane, produit par les organismes vivants (végétaux, animaux…) sous l’effet de la fermentation ou de la digestion,

mais aussi préserver les process naturels de captation du CO2, notamment la croissance des végétaux et les forêts à préserver

2. Cela implique :

a) Réduire les combustions, c’est réduire les besoins en chauffage, donc réduire le gaspillage des quantités de chaleur que nous produisons, d’une part par l’isolation des bâtiments, et d’autre part par la réduction à un niveau supportable des volumes des espaces à chauffer (ou le nombre de ces espaces).

C’est aussi réduire les combustions d’énergie fossile dans les moteurs et réacteurs, ce qui revient à réduire substantiellement nos déplacements, en tout cas les organiser autrement.

b) Quant à la réduction de la production de méthane, elle passe par une réduction de notre cheptel alimentaire et domestique (+ gérer la surpopulation mondiale ?) et par un arrêt du réchauffement climatique en cours aussi rapide que possible, afin d’éviter la catastrophe du dégel des sols arctiques avec la décomposition organique du permafrost que cela entraîne.

c) Pour la sauvegarde des forêts, s’interdire toute déforestation et les pratiques actuelles qui y conduisent, que ce soit pour nourrir notre bétail au soja ou que ce soit pour nous permettre de manger du chocolat ou autres délices exotiques dont nous raffolons : toutes ces cultures (soja, cacao, café,…) se font sur des terres déforestées, hors contrôle du plus élémentaire respect des forêts et des hommes qui y travaillent.

Voilà ce qui est à mettre en route d’urgence pour que notre monde reste habitable… ! Tout tenter pour réussir, sachant que la réponse doit être mondiale et collective

3. Climat, Gestion de l’Energie, Révolution numérique :

a) L’aspect climatique est pour beaucoup lié à l’énergie. L’énergie dont on peut disposer « proprement » est strictement limitée, ce qui interdit de la gaspiller, sous toutes ses formes, notamment sous la forme électrique !

b) Généraliser la voiture électrique (et les batteries qui les rendent autonomes) ne fait que déplacer le problème écologique en multipliant les pillages des ressources naturelles limitées de notre globe terrestre et en accroissant les pollutions chimiques. Cela mène de plus à une impasse, vu la pénurie d’électricité qui en résultera…

c) Poursuivre et développer la révolution numérique, entre tous ces appareils connectés au réseau internet et télécommunicant entr’eux, a un coût énergétique qui croît de nouvelle application en nouvelle application. Certes, elle permet le travail et les contacts à distance, donc une diminution des déplacements. Mais qu’en est-il du bilan énergétique global ?

d) Améliorer ce bilan, c’est diminuer l’impact énergétique de cette révolution numérique qui devrait être limité aux usages utiles strictement nécessaires et indispensables. Les secteurs annexes (comme la publicité mercantile ou les applications de confort ou de loisirs reposant sur des techniques extrêmement énergivores telles le streaming ou la 5G et toutes les applications futures que l’on peut imaginer) sont à abandonner ou fortement limiter à l’avenir.

C. Défi n°2, la santé et la maîtrise des épidémies :

Le seul exemple du Covid suffit à montrer l’urgence d’une approche collective mondiale simultanée pour enrayer la propagation en spirale du virus.

Ce virus se propage avec l’homme, se duplique grâce à lui. Chaque duplication est une possibilité de mutation donnant naissance à un variant. Chaque variant peut arriver à contourner peu ou prou les vaccins péniblement mis au point ou à réadapter par « Big pharma ».

L’homme se déplaçant partout (en zone « safe » comme en zone contaminée), il propage la contamination. Le problème devient sans fin, faute de vaccination mondiale suffisante, rapide et coordonnée.

C’est la terre entière qui doit devenir « zone safe », pas seulement les pays riches « du Nord » !

Pourtant, la recherche d’un vaccin a été subsidiée initialement par l’Europe, les USA, (la Chine et la Russie, de même de leur côté), à coup de dizaine de milliards d’Euros et de Dollars distribués à Big Pharma et des centaines de sous-traitants de pointe, comme BioNTech (Allemagne), sous-traitant de Pfizer.

Résultat : plusieurs vaccins trouvés très rapidement, mais impossibilité de financer une vaccination mondiale rapide, comme préconisé par l’OMS.

En cause, insuffisance des capacités de production chez les « inventeurs » des vaccins, grosse difficulté du financement du coût global, prix de revient des coûts de fabrication complètement occultes, occultation des contrats, protection absolue des brevets privés déposés (interdisant la production sur des unités de fabrication privées concurrentes disponibles) alors qu’il y a eu financement public généralisé massif et absence totale de «retour sur investissement »pour les colossaux subsides publics : les législations sont vraiment à revoir ! … et collégialement ! (avec ? sans O.M.C. ? – dont ADPIC ! ! !)

En la matière, les bénéfices sont à redistribuer autrement: diminuer la rente aux actionnaires de BigPharma et augmenter le retour au « public » de son investissement.

D. Défi n°3, Redistribuer :

1. Modifier les réglementations ci-dessus implique une redistribution inévitable des richesses produites. Cette redistribution nécessaire demande une approche mondiale collégiale solidaire et s’inscrit dans un volet social collectif à ouvrir, compagnon indispensable des volets écologiques et sanitaires évoqués précédemment.

2. Il n’y a pas de secteur qui puisse échapper à cette redistribution. Cela ne peut se concevoir que par l’acceptation générale d’une révision pacifiée des « avantages acquis » (voir 3. ci-dessous) dans toutes les classes sociales, dans toutes les sphères politiques, dans les différents sphères syndicales et associatives, d’un lieu à l’autre, partout où avantages acquis et poids politiques et économiques flirtent avec les conflits d’intérêts…

3. Les « Avantages Acquis » : Par « avantages acquis », il faut entendre toute situation actuelle née de l’Histoire (ou de la Géographie) et des rapports de forces ayant prévalus, certaines étant plus justes, plus naturelles, plus équitables que d’autres. D’autres, ne se justifiant plus, ou beaucoup moins … D’autres encore n’ayant plus de sens… Et par là nécessitant tous les ajustements et adaptations nécessaires que leur réexamen et les débats feront apparaître à la lueur objective tant des faits climatiques présents, et du futur qu’ils façonnent , que des réalités sociales !

4. Pour permettre une nouvelle répartition-redistribution de ces « avantages », moins injuste, moins insupportable, il faut redéfinir les priorités (à commencer par la priorité climatique), choisir dans nos activités ce qui est à maintenir, développer, ce qui est à réduire, supprimer, interdire …, en vue des seules priorités retenues. Apprendre, tous statuts confondus, à comprendre l’autre et le monde, et privilégier la « conscience professionnelle »

E. Une «masse critique» de citoyens et un «jeu d’équipe» qui bannit la compétition:

Les citoyens de tous les pays, les citoyens du monde, ne peuvent espérer trouver LA réponse aux défis qu’en mettant eux-mêmes tous ces défis en réflexion, en débat, concrètement, maintenant, simultanément !

A nous citoyens de l’exiger des partis politiques, des syndicats, des associations qui veulent bien s’inscrire dans le processus ! A nous de constituer une nouvelle classe mondiale puissante ! Un Mouvement fort ! Là est la lutte à présent.

Qui sont «nos amis » ? Où sont-ils ? (partout dans le monde !) Avec quels moyens chacun ? Quels besoins fondamentaux à garantir et adapter à chacun ? Quel superflu abandonner ? Comment susciter et développer une mobilisation de portée mondiale ?

Comment, concrètement, convaincre les autres par effet d’entrainement ?

Une masse «critique » de citoyens est indispensable, et à construire !

Nos seuls dirigeants politiques, gesticulant localement dans la compétition du « court- terme électoral » et soumis au lobbying, sont malheureusement incapables de l’initier car ils sont en perpétuelle compétition pour leur développement propre qui ignore le jeu d’équipe.

LA solution ne peut venir de la compétition mais exige un jeu d’équipe sans faille et sans erreur, pour l’objectif primordial à atteindre : une terre habitable et prospère!

C’est aux citoyens de ne pas rester enfermés dans une unique sensibilité politique.

Une nouvelle « classe sociale » est à constituer. « Ecologique » ? « Socio-Ecologique » ? « Libérale » ? Peu importe le nom, peu importe qui y adhérera, c’est elle qui créera le rapport de forces favorable pour contraindre naturellement le Politique à apporter les solutions aux problèmes du climat et à abandonner le mode « blabla » dénoncé par Greta.

F. Le « Jeu d’équipe » sans compétition et la gestion des « Avantages acquis » :

Le jeu d’équipe à tous les niveaux, (au niveau des Etats, des personnels politiques et administratifs de chaque Etat, des divers organismes constitutionnels de concertation, des pouvoirs et des contre-pouvoirs…) créera les conditions pour réorienter, redistribuer plus équitablement tous les avantages acquis et de situation existants pour permettre d’atteindre l’objectif commun en relevant tous les défis…

Coordonner les Etats, supprimer leur esprit de compétition, pour qu’ils mettent en place et développent sans compétition l’infinité de réflexions et d’actions coordonnées nécessaires pour développer une terre habitable et prospère. Voilà le programme pour nos hommes politiques, poussés par la nouvelle classe politique, le Mouvement « politique » fort en question! Mais avec quels moyens ? Réponses ci-après …

G. une nouvelle ORGANISATION MONDIALE à construire, à géométrie variable

Un nouvel organisme, une nouvelle « ONU » dont la structure, l’organisation, et le fonctionnement permettent aux pays adhérents de faire émerger toutes les actions d’intérêt général mondial à poursuivre… , sans véto, et excluent la compétition entre ces mêmes adhérents …,

… Nouvel organisme que l’on pourrait baptiser « NOUVELLE ORGANISATION UNIE MONDIALE » à laquelle seront attribuées toutes les compétences nécessaires et dont l’exercice devra primer sur les droits nationaux des Etats membres et les pratiques actuelles inadaptées …,

… Nouvel organisme que l’on pourrait assister, en relais du « GIEC », d’un « GIECO » …  Groupe d’experts Intergouvernemental Economique !

Cette « NOUVELLE ORGANISATION UNIE MONDIALE» travaillerait sans relâche à la mise en place des stratégies nécessaires à la réalisation planétaire des objectifs à poursuivre (dont la plupart sont déjà parfaitement identifiés : GIEC – Organisations de l’ONU – Groupes gouvernementaux – Thinktanks – Journalistes d’investigation, Juristes, …), ainsi que LE calendrier utile et urgentissime à construire pour y arriver.

Cette « NOUVELLE ORGANISATION UNIE MONDIALE» serait à géométrie variable, en ce sens qu’elle démarrerait immédiatement avec les nations qui y adhèrent.

A nous, citoyens de toutes les nations, de nous mobiliser, créer le Mouvement, la Classe d’intérêts communs (terre habitable) pour qu’elle naisse vite, se développe et entraîne dans son sillage les réfractaires au démarrage.

Les décrets produits par cette « N.O.U.M. » le seront dans la philosophie du « cliquet » qui interdise, dans le cadre des mesures décidées, le retour en arrière par rapport à l’objectif à atteindre.

Pas d’autre choix possible : Trop d’exemples dans l’histoire montrent qu’une civilisation disparaît lorsqu’elle n’a pas su s’adapter à son environnement.

Notre planète doit (re)devenir habitable et prospère pour tous.

Quel beau projet global qui mérite que nous trouvions les moyens de mobiliser dans l’apathie ambiante, dans la situation généralisée de conflits, et d’oppositions d’aujourd’hui ! Mobiliser « entre les Libéraux (qui ne veulent pas être limités dans leur jouissance) et l’Ecologie politique (qui réussit l’exploit de paniquer les esprits et faire bailler d’ennui) » (cfr Bruno Latour), comprendre que tout le monde serait gagnant, que pour chacun, ce qui serait perdu à certains points de vue, serait regagné ailleurs, notamment en qualité de vie et une vie moins stressée ! Mobiliser contre les autocrates en compétition, certains rêvant de reconstituer des empires (au profit de qui ?, au nom de quel orgueil national ? pour quelle satisfaction individuelle secrète ( ? ), antinomique du salut mondial)


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